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Chico Hamilton

Un batteur qui aime la guitare...
Batteur Magazine - Octobre 1994

Question : Jo Jones a été ton professeur, si je ne me trompe ?

Réponse : Il est ma principale source d'inspiration. Plus qu'un prof, il était un ami. C'était quelqu'un de tout à fait remarquable sur le plan humain. Et quel musicien !. Je le considère plus comme un percussionniste que comme un batteur. C'est en quelque sorte l'inventeur de la charleston, du moins celui qui a donné un sens à cet accessoire.

Question : Pourtant, aujourd'hui les jeunes batteurs ignorent tout de lui.

Réponse : Les jeunes d'aujourd'hui ignorent beaucoup de choses. Et je dirais, hélas, quelque soit leur orientation musicale. La moitié des batteurs de rock n'ont aucune notion d'autres musiques telles que le jazz ou le blues. As-tu seulement idée du nombre de batteurs incapables de jouer un blues ? Il est à proprement parler scandaleux de ne pas savoir jouer le blues. Je ne suis pas du genre à dénigrer quiconque mais les jeunes devraient pratiquer le jazz et le blues. A leur décharge, il est vrai que de nos jours, il n'y a plus de big bands qui permettent d'acquérir cette expérience. Ceci dit, il y a quand même une foule d'excellents batteurs de nos jours.

Question : J'ai remarqué qu'en jouant, tu semblait sans cesse te chanter la mélodie du morceau ?

Réponse : Cela me permet de toujours savoir où j'en suis. Nous jouons une musique très ouverte, même si l'on respecte une certaine forme de type AAB ou autres. D'ailleurs, toutes les musiques ont leurs formes, c'est ce qui fait leur style. Pour pouvoir pratiquer des arrangements très libres, je me chante la mélodie, tout simplement.

Question : C'est peut-être aussi pour cette raison que ton jeu de batterie est si mélodique ?

Réponse : Je suis extrêmement flatté de t'entendre dire ça. Il est vrai que je me considère plutôt comme un batteur mélodique.

Question : Pourquoi as-tu décidé, en 1955, de devenir ton propre chef ?

Réponse : Ce n'était pas une volonté d'être chef. A cette époque, je n'ai pas eu d'autre choix. Après avoir quitté Lena Horne, il fallait bien que je fasse quelque chose. En arrivant à Los Angeles, je me suis aperçu que tous les gens que je connaissais, et avec lesquels j'avais envie de jouer, avaient déjà leur propre formation. J'ai bien sûr fait quelques affaires, mais ça ne correspondait pas à ce que j'avais envie de jouer. Il ne me restait donc plus qu'à mettre sur pied mon propre truc, et voilà.

Question : Tu as toujours de super guitaristes, en témoigne la présence de Cary DE Nigris dans ton groupe actuel. Pourquoi ce goût pour les guitaristes ?

Réponse : Je suis la providence des guitaristes. En ce qui concerne Cary, c'est lui qui m'a trouvé. Il avait besoin d'un batteur, et je passais par là, ha ha.

Question : Le jeu avec un guitariste t'est-il plus confortable qu'avec un pianiste ?

Réponse : Je sais très bien jouer avec un pianiste, mais je trouve cela extrêmement contraignant. Il faut aller là où va le piano, faire sa route en le suivant. Et il y a autant de mauvais pianistes que de bons. Et puis un piano n'aura jamais le sustain d'une guitare.

Quand tu as la chance d'avoir quelqu'un comme Cary, qui est un maître du jeu en accords, tu disposes en fait d'un orchestre complet. Cary a une véritable personnalité, à l'instar de Jim Hall ou Larry Coryell par exemple, qui ont fait partie de mes groupes en leur temps. Tous ces gens sont des stylistes, j'aime vraiment la guitare, ouaip !

Question : Tu as joué avec les plus grands noms du jazz, quelles sont les personnalités qui t'ont le plus marqué ?

Réponse : Toutes, forcément, tu t'en doutes. Chaque fois que tu joues avec quelqu'un, tu apprends quelque chose. Bien sûr, j'ai beaucoup appris du mari de Lena Horne par exemple, qui était également son arrangeur. Ainsi que de Count Basie, Billy Strayhorn, Billie Holiday entre autres. J'ai eu la chance de naître au bon moment, jai connu les bonnes, que dis-je, les meilleures années de cette musique. J'ai eu la chance de jouer avec les originaux, les créateurs de styles.

Question : Tu pourrais te contenter de cultiver un certain passéisme, en vogue actuellement d'ailleurs. Au lieu de ça, tu vas toujours de l'avant.

Réponse : Je vais où m'entraine mes baguettes, ha ha ! Tu sais, les temps changent, les gens changent et, comment dire... il faut éviter de s'ennuyer. Beaucoup de facteurs interviennent dans nos existences, et ils se retrouvent dans la musique. Quand tu joues, quand tu crées, c'est réellement quelque chose d'exceptionnel. Et le public sait faire la différence, reconnaître un groupe qui apporte vraiment quelque chose.

Question : Tu utilises depuis longtemps des figures binaires, en proclamant que ce n'est pas chose nouvelle dans le jazz.

Réponse : Il n'y a jamais rien de nouveau, c'est simplement différent. A la base, il y a une gamme de douze tons. Beethoven ou Mozart se servaient déjà de ces douze tons. La seule nouveauté possible serait d'inventer un instrument qui utilise d'autres notes.

La seule différence entre les musiques est d'ordre rythmique.
 


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