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Paul
Personne par lui-même :
"Je
suis totalement autodidacte. Gamin, je voulais être
guitariste et je m'étais fait une guitare en carton.
Puis j'ai flashé sur la batterie et je suis resté batteur
pendant dix ans, tout en restant proche de la guitare.
Pendant tout ce temps, j'avais une vieille guitare
espagnole montée avec des cordes en métal. Elle me permettait
de repiquer les accords des Beatles. Bon, je n'étais
pas très fort, disons plutôt besogneux et passionné.
Alors, quand je n'arrivais pas à trouver un accord,
j'allais demander de l'aide à un pote guitariste. Petit
à petit, je prenais des informations un peu partout.
Quand
les Hendrix, Cream, Clapton sont arrivés, j'étais encore
batteur. Je n'ai donc pas passé mon temps à repiquer
leurs plans à la note près. Enfin, si, quelques uns
quand même...mais seulement des phrases qui me flashaient.
Disons que je suis plutôt imprégné de l'ambiance musicale
des BB King et Albert King.
En se plongeant dans
leur univers, on met forcément un feeling "à la
manière de...". Sans jouer comme eux, on s'approche
de leur style tout en restant soi-même. Cela évite le
côté "clonage" qu'on rencontre chez certains
fans de Stevie Ray Vaughan.
Il faut prendre
conscience qu'on ne sera jamais à la place de nos idoles,
et je pense qu'il faut plutôt rechercher à l'intérieur
de soi. Je connais des mecs qui ont grandi avec un pantalon
"moule burnes" et qui s'obstinent à jouer
de la guitare électrique alors qu'ils trouverons plus
facilement leur vie dans la guitare acoustique...
J'étais
un boulimique de musique et j'allais acheter un disque
dès que j'avais trois ronds, comme tous les mômes. Quand
je n'avais pas de thunes, c'était un copain qui me faisait
des copies sur K7.
A force d'entendre de la
musique, on a envie de repiquer des plans, et bien sûr,
on n'arrive pas à comprendre le plan entier. C'est là
que ça devient intéressant : quand on a un début, il
faut trouver soi-même la fin avec quelque chose de personnel...
Cela
évite d'avoir un prof qui te force à tenir ton médiator
comme ça et pas autrement alors que t'es peut-être même
pas fait pour jouer au médiator. Il y a mille façons
de tenir un totor, la main repliée, ou droite ou en
le tenant comme une plume à la Hendrix. C'est vraiment
chacun son truc.
Alors avec toutes les maladresses
qu'on a eu au départ, on apprend malgré tout. Et puis
le truc, c'est de ne pas focaliser sur la guitare. Les
solos, j'adore ça, mais finalement, dans une chanson,
ce n'est pas peut-être pas ce qu'il y a de plus important.
Je
préfère quand même une bonne chanson bien finie avec
des arrangements. Et s'il y a un solo pour s'exprimer
c'est bien, mais le riff ou le solo ne sont jamais d'une
chanson.
Ce qui m'a toujours botté, c'est le
côté mélodique des choses. Prends le solo de Little
Wing (de Jimi Hendrix), certains solos de Santana ou
de George Harrison : on peut les chanter...Alors que
je n'ai jamais réussi à siffloter un solo d'Yngwie Malmsteen...
J'ai
toujours appris la gratte en essayant de travailler
des façons de phraser, de tirer les cordes ou en cherchant
un vibrato qui me botte, mais surtout pas en astiquant
le manche à toute vitesse pour esbroufer...Je n'ai rien
contre les mecs qui jouent très technique, mais je pense
qu'avec le temps ils apprennent que trois notes expressives
valent mieux que dix sans intérêt.
C'est peut-être
une question de caractère, mais j'ai toujours aimé l'aspect
mélodique de la musique, je parlais souvent à l'école
en sifflant des trucs entendus à la radio, même "Allez
venez Milord..." d'Edith Piaf ou un refrain des
Compagnons de la Chanson.
Malgré toutes ces années
de guitare, c'est vrai que je ne sais pas où sont les
Do sur le manche. Je ne sais pas lire et je n'ai jamais
trop fait d'analyse pour essayer de caser la septième
mineure ici ou là.
Alors en jouant comme ça à
l'instinct, c'est vrai que les doigts se posent un peu
par hasard : on joue ce qui vient en premier, le truc
facile et habituel. Cela peut bien sonner, mais quand
on se réécoute, on se dit souvent : "Ouais...peu
mieux faire".
Là on cherche autre chose,
et quand on a trouvé, c'est souvent un truc très mélodique,
un gimmick qui redonne un petit plus à la chanson.
J'ai
commencé la guitare assez tôt, vers quinze ans. C'est
vrai que lorsqu'on est môme, même entre 10 et 20 ans,
on est très perméable aux informations. Qu'il s'agisse
de Game Boy, de foot ou d'autre chose.
Et pourtant,
si on prend Albert King, il était chauffeur et n'a commencé
la guitare que très tard. Cela ne l'a pas empêché de
trouver un putain de style qui a été repris par tous
les guitaristes de rock par la suite !
Alors
le côté "petit génie", c'est très beau : si
tu prends Arthur Rimbaud ou Hendrix, ce sont des types
qui ont tout dit tout de suite, mais ils se sont brûlés
très vite.
Je rencontre souvent des gens entre
deux âges qui ont abandonné la musique pour des raisons
familiales ou professionnelles et qui pensent qu'il
est "trop tard pour s'y remettre...". Qu'est-ce
que ça veut dire "trop tard" ? Avoir du succès
?...Être "connu" ?... Ou tout simplement se
faire plaisir ?
J'ai envie de leur dire, "si
tu as le temps, achète-toi une guitare, une batterie,
prends des cours, éclate-toi et si demain tu n'es pas
Django Reinhardt, c'est pas grave !" Il n'est pas
jamais trop tard, même pour un retraité puisque les
problèmes d'arthrite n'ont pas l'air de gêner BB King
qui a encore progressé alors qu'il est autour de 80
balais...

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