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Brian Setzer

Guitariste et chef d'orchestre
Guitarist Magazine n°119 - Décembre 1999

Question : Ta carrière semble placée sous le signe du revival, après le rockabilly avec les Stray Cats, le swing avec l'Orchestra. Tu n'as pas parfois l'impression d'être plus tourné vers le passé que l'avenir ?

Réponse : Tu as peut-être ce sentiment, moi pas. Ce qui différenciait déjà les Stray Cats de tous les autres groupes de rockabilly de l'époque et, il y en avait beaucoup, c'est que nous apportions quelque chose de nouveau. Je n'ai jamais été bloqué dans les années 50, comme si la musique et le monde s'étaient arrêtés depuis. Cela m'a toujours paru absurde et ennuyeux. J'ai toujours pensé que la seule façon de bien faire de la musique, c'est que ce soit la vôtre et qu'elle soit nouvelle. Même quand j'avais la sensation de me trouver dans un gigantesque Scenic Railvay, accélérant avec le succès, je n'ai jamais été tenté par autre chose.

Pourtant, à 20 ans, la tête te tourne facilement et les conseillers ne manquent pas. C'est à cause de cela que les Stray Cats sont devenus et restés populaires ou que l'Orchestra rencontre aujourd'hui le public. Parce que je ne me contente pas de reprendre simplement les vieux tubes de Glenn Miller en les réarrangeant d’une façon plus actuelle. Je ne fais pas de la musique swing, j’y ai introduit du rockabilly et un peu de jazz. Cela c’est nouveau, et d’ailleurs personne ne croyait que cela allait marcher.

Question : Comment es-tu passé de la fin des Stray Cats aux débuts du Brian Setzer Orchestra ?

Réponse : J'avais déjà cette idée pendant notre dernière tournée en 1992. Lee (Rocker) et Jim (Phantom) le prenait d'ailleurs assez mal, mais je pense qu'on était tout simplement au bout de la route. Sans plaisir, sans énergie. On avait pourtant fait un bon album, avec Dave Edmunds (Choo Choo Hot Fish), mais pour un petit label et personne ne s’en était rendu compte. Les salles étaient à moitié vide et cela commençait à vraiment me peser de tourner dans ces conditions après ce qu’on avait vécu.

Il y avait un gouffre entre ça et entendre «Runaway Boy » sur n'importe quelle radio, quel que soit le pays où l'on se produisait. Un gouffre qui s'est transformé pour moi en distance vis-à-vis des Stray Cats. J’ai dit aux autres que j’allais me lancer dans ce que j'avais vraiment envie de faire à ce moment-là. D’autant que cela me travaillait depuis longtemps. Très longtemps même. Depuis mes premiers pas à la guitare, guidé par un vieil italien de New York qui m’a appris mes premiers accords de jazz. J’ai toujours voulu m'en servir un jour différemment. J’y pensais même quand les Stray Cats ont été invités au Tonight de Johnny Carson à la télé pour notre premier hit, «Rock this Town». Il y avait un grand orchestre et j'avais envie de leur demander de jouer avec nous. Je ne me rendais pas compte que sur un plateau de télé, les choses ne se passaient pas comme dans un club.

Question : Donc tu as démarché les maisons de disques pour trouver un contrat pour le Brian Setzer Orchestra ?

Réponse : Pas du tout. Mon idée, c’était d'abord de mettre les Stray Cats de côté pour un temps, de me mettre à écrire les chansons pour un grand orchestre et de faire quelques concerts, pour voir. En fait, j’ai rapidement vu, que d'une part cette histoire allait m’accaparer plus que je ne croyais et qu'en plus, les gens pensaient que j'étais fou. Qu'aucun patron de club ne se mouillerait pour engager un groupe que personne ne connaissait, surtout qu'il s'agissait d'un grand orchestre avec la guitare en instrument lead et que cela allait coûter bonbon. Tout le monde m’a dit d'oublier ça. Moi, j'ai voulu continuer, j’ai écrit les morceaux et j’ai réuni les musiciens, des jazzmen habitués des séances de Los Angeles. Ceux qu'on appelle souvent quand les artistes rock ont besoin d'une section de cuivres pour certains morceaux. J'ai dû les convaincre que je voulais autre chose, que je n'étais pas simplement un guitariste jouant fort qui voulait de jolies pêches de cuivres pour mieux s’exhiber.

Je leur ai expliqué que je les respectais, pour ce qu'il étaient, et que mon but était de former un orchestre, un véritable grand orchestre dont ils allaient devenir partie prenante. Que je voulais réellement créer un groupe de musiciens aussi soudé qu'un trio rock'n'roll. J'espérais que leur confrontation avec le public auquel j'étais habitué leur fasse prendre conscience de cela. Résultat, les premiers tourneurs voulaient annuler les concerts. Il n'y avait que quelques dizaines de tickets vendus. Je leur ai dit que s'il le fallait, je paierai l'orchestre de ma poche, mais que cela avait été trop loin et que je n'étais pas prêt à renoncer. Heureusement, parce qu'il y a eu un bouche à oreille monstrueux et que nos concerts ont tout de suite rempli les clubs de Los Angeles. Là je n'avais plus besoin d'expliquer aux musiciens ce que je voulais faire. Ni d'aller chercher les décideurs des maisons de disques qui venaient d'eux-mêmes attirés par la rumeur. La bonne musique est le meilleur des passeports.

Question : Tout s'est passé assez vite alors ?

Réponse : Tu veux dire qu'on a signé si rapidement pour faire un premier album que je n'ai pas eu le temps d'écrire suffisamment de morceaux. Du coup, on a été contraint de se contenter de reprises. Je me suis rattrapé au deuxième que j'ai pu davantage tirer vers le rock, comme j'en avais le projet. J'ai surtout pu nettement mieux intégrer ma guitare rockabilly à l’ensemble. J'étais sûr que cela fonctionnerait bien.

Question : Ce qui m'étonne, c'est ton apparente facilité à écrire pour un orchestre de 17 musiciens alors que jusque là tu le faisais pour un trio...

Réponse : Ce n'est pas si différent. La partie purement composition n'est pas plus difficile pour un trio ou un grand orchestre. J'aurais pu balancer à certains moments une chanson par jour aux Strat Cats, mais ce n'est pas comme cela qu'on fait de la musique. Il faut penser aux parties que chacun va faire, même dans un trio, revenir sur ce que cela peut changer à ton idée de départ et développer l'ensemble si tu veux arriver a un morceau qui tienne la route. Avec un grand orchestre, c'est la même chose, sauf que tu as le sentiment d'avoir à écrire un livre, pas une nouvelle.

J’ai beau savoir écrire la musique, je me suis fait aider par le trombone ou par Patrick Williams, qui a travaillé pour Frank Sinatra. Je finissais par me perdre dans la façon d'arranger les voies des cuivres. Au début, tu as tendance à en faire trop, surtout à profiter de la puissance dont tu disposes pour en rajouter des couches, sans assez mettre en valeur les différents instruments et les solistes. J'adore la façon dont Count Basie savait faire cela, mais on ne s’improvise pas Count Basie. Enfin... tu finis par te calmer et tu apprends à laisser suffisamment d’espace pour que chacun puisse s'exprimer, y compris moi.

Question : A ce propos, as-tu fait évoluer ton jeu de guitare entre les Stray Cats et le Brian Setzer Orchestra, à l'écoute cela ne semble pas si évident...

Réponse : C'est normal parce que je ne joue pas différemment. La seule chose qui change c'est que je suis obligé de tout écrire, y compris les chorus, pour que l'orchestre s'y retrouve. Tu ne peux pas avoir la même souplesse en passant d'un trio rockabilly à un big band. Avec cinq saxos, quatre trombones et quatre trompettes dans la section de cuivres ce n’est pas possible Cela n’empêche pas que mon guitariste favori reste Chuck Berry.

Question : On dit que tu t'intéresses plus à tes voitures qu'à tes guitares. Gretsch a pourtant sorti des modèles Brian Setzer qui ont été conçus en collaboration avec toi et ton guitar-tech, Rich Modica, alors ?

Réponse : Alors la Gretsch Brian Setzer Hot Rod est disponible en finition mandarine métallisée, exactement comme mon hot-rod préféré. L’important c’est ce que je te disais tout à l’heure, c’est d’avoir son style. Guitares ou voitures, j’aime les gens qui osent s’affirmer.

 


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